mardi 4 septembre 2018

Conclusion

La PTL est décidément une course de costauds, faite par et pour des montagnards, des vrais. 
C’est une course intimiste et élitiste, très loin des ultra trails "grand public" comme l'UTMB, où il suffit de s'entrainer à courir longtemps et à enquiller du dénivelé pour être finisher.
Nous nous étions préparés physiquement à affronter la distance et le dénivelé, mais nous avons été surpris par la difficulté technique de la course : des chemins de crêtes étroits, des pentes très sèches, beaucoup de passages où il est nécessaire de mettre les mains pour escalader, et surtout énormément de pierriers, parfois très pentus, parfois constitués de pierres instables, ou de gros blocs demandant beaucoup d'efforts et d'attention pour être franchis. 
Il est bien difficile pour les franciliens que nous sommes de nous entrainer à de telles conditions !
La PTL est aussi un contre-la-montre permanent, chaque heure gagnée dans la course permettant de s’offrir une heure de sommeil… à ce jeu-là, nous n’avons clairement pas suffisamment gagné ! Je reste quand même impressionné que nous ayons pu aller aussi loin avec aussi peu de sommeil.

Malgré toutes les difficultés, les douleurs, les moments de doute, je suis très content d’avoir pu prendre part à cette aventure incroyable, et de l’avoir partagée avec Corentin. La PTL représente désormais pour moi la nouvelle référence des courses en montagne, un graal pour l’instant inaccessible et qui me fait rêver. Mais nous n’avons pas dit notre dernier mot !
Je voudrais adresser un grand bravo à l’équipe « On fait juste la p’tite trotte » d’Olivier Ingouf (ancien rocstars) avec qui nous avons fait un bout de chemin. Nous sommes bien placés pour mesurer l’immensité de l’exploit qu’ils ont accompli en bouclant cette PTL 2018.
Enfin, je voudrais remercier toutes celles et ceux qui nous ont inondé de messages de soutien durant la semaine. Savoir que vous étiez nombreux, scotchés à l’appli ou au site de suivi live de la course nous aura mis une petite pression positive qui nous aura souvent aidé à rester motivés et déterminés durant les moments difficiles.
Enfin, un grand, très grand merci à Anna pour son soutien sans faille durant les longs mois de préparation et pour son assistance impeccable durant la course. Je compte sur toi pour être de nouveau à nos côtés le jour où nous prendrons notre revanche J

Le tournant de la PTL

Même si vous connaissez déjà tous la fin de l'histoire, je vais quand même vous raconter dans le détail nos dernières heures de course.    

Jeudi en fin d'après-midi, nous quittons le refuge de la Balme et nous engageons sur le chemin vers les Arolles, au milieu de superbes paysages.
Les heures passent et la nuit arrive, apportant avec elle un brouillard de plus en plus dense. A ce stade, nous avons très peu dormi depuis le début de la course (environ 3h30 en 4 nuits en ce qui me concerne), et le coup de pompe de la nuit arrive jour après jour de plus en plus tôt, et de plus en plus fort. Il commence à me tomber dessus vers 21h30. Je tente de lutter autant que je peux, mais nous devons bientôt nous arrêter toutes les heures pour dormir 10 minutes, directement par terre, sur le chemin.
Un premier évènement va bientôt me sortir de ma torpeur. Alors que nous sillonnons la montagne sans trace de civilisation depuis 5 ou 6 heures, notre chemin débouche sur un petit parking en terre. Une voiture est là, au milieu de nulle part…c'est Anna, qui est là , toute seule à nous attendre depuis 20h, pour nous encourager et nous apporter tout son soutien !!! incroyable .... une fois de plus, elle aura assuré ! Après quelques mots échangés et quelques bisous (pour moi :-), nous nous relançons dans la nuit et le brouillard, reboostés par cette visite surprise. 
Malheureusement, l'effet sera de courte durée, et je replonge très vite dans mon demi sommeil, marchant en suivant mécaniquement Corentin qui semble heureusement en meilleure forme que moi. 
Vers 1h du matin, nous arrivons à un point où le chemin est barré par un éperon rocheux. La trace GPS semble indiquer qu'il faille le contourner par une pente en herbe et en terre qui semble très pentue. Au même moment, nous apercevons en contre-bas de la pente la lumière de trois frontales . Ce sont celles d'une équipe française (des Alsaciens) qui tentent de remonter péniblement la pente. Lorsqu'ils arrivent enfin à notre hauteur, ils nous indiquent que c'est horrible, super glissant et dangereux du fait de l'humidité malgré les crampons, qu'ils n'ont pas trouvé le passage à travers l'éperon et qu'ils renoncent ! 
Corentin n'est pas chaud du tout pour s'engager dans cette pente sans savoir si on pourra en sortir. De mon côté, je chausse mes crampons et je descends quelques instants pour tester le terrain. Je crois trouver un passage (qui n'est finalement pas le bon), mais surtout j'ai l'impression que ça ne glisse pas tant que ça ! 
Entre temps tout le monde finit par être gelé par le brouillard glaçant et nous décidons de revenir en arrière pour trouver un endroit où nous mettre en sécurité en attendant de décider de la meilleure chose à faire. La situation est confuse et je sens qu'elle est en train de nous échapper ... nous appelons le PC course pour leur redemander comment faire pour nous sortir de cette situation compliquée. Ils nous proposent d'attendre que d'autres équipes passent pour que nous prenions exemple sur elles, ou à défaut que nous revenions en arrière pour nous abriter pour la nuit dans un refuge, à 1h30 de marche. 
Nous faisons les calculs : si nous allons à ce refuge pour attendre le jour, nous n'avons aucune chance d'arriver à temps à la prochaine barrière horaire en poursuivant  par l'itinéraire normal. L'équipe alsacienne, bien décidée à ne pas retourner dans la pente, choisit pourtant cette option. Corentin semble prêt à les suivre. Je tente de le convaincre de retourner dans la pente et de chercher le passage, mais il craint que l'on ne s'engage dans une situation critique dont on ne saura pas se sortir (échaudé par certains passages très techniques voir dangereux que nous avions pu affronter précédemment durant la course - mais de jour). Je pense qu'il faut persévérer, toute notre course en dépend. Et en même temps je ne me sens pas le droit de lui imposer de s'engager dans une situation qu'il juge trop dangereuse. La mort dans l'âme, j'accepte que nous suivions les alsaciens au refuge. 
Entre temps, d'autres équipes sont arrivées sur les lieux. Nous leur expliquons la situation et notre décision, mais elles décident d'aller vérifier par elles-mêmes. Nous apprendrons par la suite qu'elles trouveront le passage dans l'éperon rocheux seulement quelques minutes après notre départ. Elles tenteront de nous appeler, mais nous n'entendrons pas leurs cris, déjà trop loin ou trop fatigués. 
Nous marchons pendant 1h30 qui me semble en être 10. Je n'en peux plus, je suis au bout. Je marche comme un robot mais mon cerveau ne fonctionne plus, il réclame seulement de dormir, n'importe où mais tout de suite. Heureusement que Corentin est plus lucide et qu'il assure la navigation de la troupe. De temps à autre je lève les yeux, mais je peine à comprendre où je suis et qui sont ces gens autour de moi avec ces lampes frontales. Il est temps que cela s'arrête. 
Nous arrivons enfin au refuge vers 4h30 du matin, exténués, et nous nous octroyons 3h30 de sommeil. 
Le lendemain matin, nous discutons de la suite de la course avec l’équipe alsacienne. Faut-il abandonner, ici, au refuge ? Faut-il y retourner, s'engager de nouveau dans des heures d’effort, juste pour l'honneur ou par orgueil ? 
Les alsaciens décident d'en rester là, Corentin et moi choisissons d'y retourner. La maigre nuit de sommeil et le petit déjeuner nous ont fait du bien, et la progression de jour n'a rien à voir avec les conditions nocturnes. Après 1h de marche nous arrivons de nouveau à la difficulté sur laquelle nous avons buté durant la nuit. Il nous faut peu de temps pour trouver le passage et franchir l'éperon rocheux. Je suis amer mais je ne peux en vouloir à personne. Même si nous avions réussi à passer durant la nuit, j’imagine mal comment on aurait pu beaucoup avancer ensuite, étant donné mon état d'épuisement. Peut-être aurions pu réussir à dormir un peu quelque part, et gagner quand même Beaufort à temps, tant bien que mal. Peut-être pas. 
La fameuse pente - bien différente de jour et avec moins de brouillard ...
 Le reste de la journée est assez agréable, nous ne croisons absolument personne alors que nous découvrons les magnifiques paysages du Beaufortain. 

Nous arrivons vers 18h au refuge des Arrolles. La barrière horaire de Beaufort est à 20h, et notre plan de marche indique encore 8 ou 9h d'effort avant d'y arriver. Cette fois nous décidons d'en rester là. Aucune envie de se retrouver dans le même état de fatigue extrême que la nuit précédente, sur des terrains potentiellement plus accidentés, alors que l'issue de la course est déjà  scellée. 
Je suis quand même bien content de cette dernière journée de ballade, et très fier que nous ayons relevé la tête ce matin et trouvé l'énergie de repartir.
Anna nous récupère une heure plus tard avec sa voiture en contre-bas du refuge. Fin de la PTL 2018 pour l'équipe Ultra Rocstars 4.0, après 106 heures de courses, 180km parcourus et plus de 16000m de D+.

samedi 1 septembre 2018

Fin de PTL pour les Ultra Rocstars

Corentin et moi avons dû abandonner la course au 180ème km, car la barrière horaire de Beaufort (le vendredi à 20h à Beaufort) n'était plus atteignable.  Grosse déception pour nous évidemment,  d'autant plus que nous avions largement les moyens de continuer (il aurait quand même fallut que l'on dorme un peu et que l'on soigne nous pieds !)...mais très contents d'avoir pris part à cette course hors norme,  et fiers d'avoir été aussi loin. 
On vous racontera tout ça en détails un peu plus tard.
Mille merci pour tout vos messages de soutien et vos encouragements, ils auront été très précieux.

Corentin & Pierrick